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To be Where the Pixels are – Eric Joris/The Crew interview par/by Jacques Urbanska

publish the 6 May 2014 at 20 h 56 min

Cette interview a été publiée dans l’ouvrage “10 ans de Numériques à Mons” (Editions Technocités 2014)

À la différence des écrans scéniques, la scène-image serait la transposition de la scène1 elle-même en images. Sans écran identifiable ,la proposition devient une immersion dans une imagerie 3D, associée à des technologies d’interactivité permettant d’agir sur le visuel, de le modifier en temps réel ou en temps diffé- ré. Dans la scène-image, le visuel médiatisé devient un espace habitable, sensoriel, inte- ractif et modifiable à souhait2. Emmené par l’artiste Eric Joris, le collectif belge CREW3 explore des immersions très spécifiques, au travers de projets qui tentent d’élaborer, de circonscrire et de théoriser un nouveau médium artistique.

À la différence d’autres recherches du même genre, la sensorialité artefactuelle immersive de CREW a toujours privilégié la diffusion d’images vidéo issues d’une captation et non pas d’un virtuel créé de toutes pièces. Cela induit pour le public des univers proches de leur réalité, qui peuvent donc plus facilement se mélanger, se substituer ou se superposer à cette dernière. Le mélange de captations, live versus préenregistrées, crée des zones de flotte- ment, des pertes de repères – qui peuvent être minimes – mais qui génèrent des expériences mentales et physiques inhabituelles.

Si les philosophes créent des concepts, les artistes travaillent sur des percepts : « un ensemble de perceptions et de sensations qui survivent à celui qui les éprouve4 » et qui influencent durablement notre manière de percevoir et de penser le monde. Ce qui intéresse Eric Joris, c’est moins ce que l’on fait avec la technologie que ce que la technologie produit sur nous : « Nous essayons de créer des conditions technologiques dans lesquelles nous pouvons nous plonger entière- ment, qui nous détachent d’une certaine réalité à laquelle nous sommes habitués. Nous regardons alors les effets qui en résultent et c’est la matière première de nos spectacles. Il ne s’agit pas seulement de réactions intellectuelles, ça peut être très physique et très fort : lors de nos premiers essais, beaucoup de personnes se sentaient mal et une sur dix s’évanouissait littéralement pendant l’expérience. Il a fallu affiner le cadre, trouver des moyens pour transformer la recherche en expérience reproductible, afin de pouvoir la (re) présenter au public. » En une quinzaine d’années, le collectif a produit une trentaine de projets qui vont de l’installation à la performance théâtrale.

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Unlike theatrical screens, the ‘stage-image’ is the transposition of the stage itself into images. Without an identifiable screen1, the proposition becomes an immersion in 3D imagery, associated with interactive technologies that enable the adaptation of the visual by either real-time or deferred-time modification. In the stage-image, the mediatised visual becomes a space that is habitable, sensory, interactive and modifiable at will2.

Led by artist Eric Joris, the Belgian collective CREW3 explore very specific immersions which seek to elaborate, define and theorise a new artistic medium. Unlike other research in the same area, CREW’s immersive, artefactual sensorial experiments have always favoured the diffusion of video images filmed and not virtually assembled from all sides. This introduces the public to worlds close to their reality, which can therefore be more easily merged, substituted or superimposed upon it. The mixture of video recordings, live versus pre-recorded, creates obscure zones, the loss of reference points – which can be minimal – but which generate unfamiliar mental and physical sensations.

If philosophers create concepts, then artists work with percepts, defined as: “an amalgam of perceptions and sensations which exist for those who experience them4” and which create a lasting impression on our way of perceiving and viewing the world. What interests Eric Joris is not so much what we do with technology, as the effect technology has on us: “We try to create technological conditions in which we can be fully immersed, which detach us from a certain reality with which we are familiar. We then observe the effects that this produces, which is the primary content of our productions. It is not merely a case of intellectual reactions, they can be very physical and very strong: during our first productions a lot of people felt unwell and one in ten literally fainted during the performance. We had to adjust the settings and find ways of transforming the research into reproducible experiments in order to be able to (re)introduce it to the public.” Over a period of fifteen years the collective has produced around thirty projects, from installations to theatrical productions.

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